Une oeuvre, deux interprétations, des milliers de possibilités
Nous adorons les reprises, ces chansons interprétées par d’autres, parfois même arrangées, réorchestrées.
Pour prendre un exemple parmi cent, j’éprouve toujours beaucoup de plaisir à découvrir de nouvelles interprétations de Nature Boy, chanson écrite par Nat King Cole et reprise, notamment, par Bowie, Sinatra, Massive Attack, Marvin Gaye, Mile Davis, Rick Astley, and so many others (compil ici).
En musique classique, les reprises n’existent pas vraiment. La même oeuvre est parfois écrite pour une voix de femme ou celle d’un homme; avec orchestre ou piano seul. C’est le cas par exemple des Chants du Compagnon errant de Gustav Mahler. Mais ce n’est pas ce qui constitue la diversité de la musique classique.
Non, il s’agirait plutôt les nuances infinies de l’interprétation.
Ce qui explique que, lorsque vous vous trouvez devant le bac à disques de votre Fnac ou que vous effectuez une recherche sur internet, vous deviez faire face à des dizaines d’albums de la même oeuvre, tiens, le Requiem de Mozart par exemple et que vous renonciez devant un tel choix, une telle abondance et si peu de conseils pour choisir.
Figurez-vous que les fans hardcores de musique adorent ça, fureter dans les bacs et se constituer d’incroyables discothèques avec parfois, plusieurs dizaines d’interprétations de la même oeuvre par Léonard Bernstein en 1959, mais aussi en 1981, par l’Orchestre de Boston ou celui du Capitole, sans oublier le MET 96 parce que la prise de son est dingue.
Mais pour vous ou moi qui ne sommes pas des experts, mais plutôt, des amoureux, dirons-nous, les variations entre telle ou telle interprétation ne sautent pas forcément aux oreilles.
Alors, pour forcer un peu le trait et vous montrer comment deux interprètes peuvent concevoir la même oeuvre de manière radicalement différente, voici deux petits morceaux au piano des Tableaux d’une Exposition de Mussorgski.
- À ma gauche, Leonard Pennario – que je ne connais pas -, qui interprète le Cum mortuis in lingua mortua – méditation autour d’un tableau représentant les catacombes de Paris – au pas de course, en 1:25.
- À ma droite, notre cher Ivo Pogorelich qui étire et suspend le temps de son interprétation – tant de liberté me sidère à chaque écoute – pour peindre son tableau en 3:54.
Une oeuvre, deux interprétations, des milliers de possibilités.